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Où en est la corruption dans le monde ?
03 octobre 2002

25 août 2004

Vous avez tous entendu parler d’Amnesty International, mais vous êtes probablement beaucoup moins nombreux à connaître le nom de Transparency International.



C’est une organisation non-gouvernementale, créée en 1993 autour de Peter Eigen, un ancien membre de la Banque Mondiale. Depuis plusieurs années, Eigen tentait d’attirer l’attention de l’organisme auquel il appartenait sur les pratiques de corruption qui existent dans tous les pays du monde. Faute d’avoir pu intéresser les membres de la vénérable institution à cette tâche, il a fondé avec une poignée d’individus Transparency International, dont le siège est à Berlin. Aujourd’hui, l’ONG compte dans le monde entier des observatoires qui, au moyens d’indices complexes mais très rigoureux, dressent un palmarès de la corruption. La méthode d’enquête de Transparency International consiste à expédier des formulaires et à mener des entrevues auprès de 42 000 correspondant dans le monde. Ces participants peuvent être des hommes d’affaires, des fonctionnaires internationaux, des universitaires, des journalistes et des analystes politiques qui connaissent bien les pays visés par la recherche.

Qu’est-ce que la corruption ? La définition la plus large est « l’abus de pouvoirs conférés par une fonction publique à des fins d’enrichissement personnel ». Evidemment, c’est le cas de figure le plus simple. Dans un pays donné la corruption est d’autant plus importante que les institutions sont faibles. En fait, la corruption peut prendre des formes qui dépassent l’individu et les frontières : lorsqu’une multinationale « arrose » les officiels d’un pays en développement pour que ceux-ci choisissent leurs produits plutôt que d’autres, c’est de la corruption. La corruption ne consiste pas nécessairement à acheter des individus, elle peut prendre l’aspect d’un don altruiste : par exemple, il y a une vingtaine d’années, la firme Nestlé avait pris l’habitude de distribuer des boîtes de lait concentré aux femmes des pays en développement pour les inciter à abandonner l’allaitement maternel au profit de l’alimentation artificielle...

Les résultats obtenus par Transparency International sont ensuite transposés sous la forme d’un palmarès de pays notés de un à 10. Un score parfait de 10/10 signifie que le pays est totalement dépourvu de corruption. Un score de 1/10 signifie que le pays est absolument corrompu.

La Finlande est première avec la note de 9,7/10. La France ne vient que bien plus loin, en 25e position avec... 6,3/10.

Savoir que la corruption existe dans notre pays, est-ce que ça nous permet d’agir dessus ? Oui, à condition de repérer autour de nous les corruptions quotidiennes, celles auxquelles nous participons personnellement, presque sans y réfléchir. C’est d’autant plus important que la différence peut être parfois flouzailleuse entre services, solidarité et corruption. Quand on met en commun des ressources afin d’améliorer la situation des individus, c’est de la solidarité, ce n’est pas de la corruption. En revanche, proposer des services en apparence altruiste pour en tirer un profit personnel, c’est de la corruption.

Un exemple : il y a quinze ans, un cardiologue de la région où j’exerce adressa aux généralistes qu’il connaissait une lettre dans laquelle il proposait une pratique apparemment altruiste. « Au lieu de m’envoyer systématiquement les patients qui souffrent de palpitations, écrivait-il, je vous prête un appareil d’enregistrement cardiaque que vous leur poserez vous-même. Une fois l’enregistrement effectué, vous me l’envoyez, et je l’interprète. Comme ça, le patient évite des aller-retours et moi je ne suis pas obligé de voir en consultation des personnes qui n’en ont pas besoin. » Dit comme ça, ça avait l’air plutôt bien : tout le monde économisait du temps et de l’argent en évitant des consultations inutiles. Seulement, à la fin de la lettre il précisait : « Evidemment, je partagerai avec toi la rémunération des examens ». Là, ça n’était plus de l’échange de bons procédés ou de la solidarité, ça devenait de la corruption.

Regardons autour de nous, observons les « échanges de bons procédés » que nous pratiquons tous les jours et peut-être, qui sait, un jour, pourrons-nous rattraper la Finlande...




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