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Que coûtent la pose et le retrait d’un implant contraceptif ?
par Martin Winckler

22 décembre 2005

Il m’arrive régulièrement de recevoir des patientes qui me demandent de leur
poser ou de retirer un implant prescrit ou inséré par un autre médecin. Ça
ne me gêne nullement (c’est mon boulot), mais je suis toujours étonné de les
entendre dire que le médecin qui a prescrit l’implant (à leur demande) refuse
de le leur poser ou que celui qui le leur a posé refuse de le retirer.



NB IMPORTANT !!!!! Désormais, en France, les sages-femmes peuvent prescrire toutes les contraceptions. Elles posent de plus en plus souvent des DIU et peuvent aussi poser des implants. Pensez aux sages-femmes pour votre contraception !!!!!


Qu’un médecin hésite à retirer un implant, je peux le comprendre :
cela demande une certaine habitude, surtout si l’implant est posé profondément.
On peut hésiter à le faire si on ne l’a pas déjà fait une dizaine de fois
(mais d’un autre côté, si on hésite à le faire, comment pourra-t-on acquérir
l’
expérience nécessaire pour le faire... ?).

Je peux admettre qu’on ne veuille
pas se risquer à retirer un implant profond quand on n’a pas l’habitude, mais
je ne comprends pas qu’on refuse de retirer un implant apparent sous la peau
et qui roule sous le doigt - et c’est le cas de la plupart des implants.

Le retrait d’un implant sous-cutané superficiel demande cinq-six minutes
pour que l’anesthésie locale ait endormi la peau, dix secondes pour faire une
incision de quelques millimètres et vingt secondes pour retirer l’implant avec
une petite pince. Parfois, quand on incise juste au-dessus d’une extrémité de
l’implant, il suffit de pousser sur l’autre extrémité pour qu’il sorte tout
seul. On ne peut pas dire qu’il s’agisse de chirurgie lourde !

Refuser d’ insérer un implant, ça me paraît beaucoup plus
incompréhensible
car c’est aussi facile que faire une piqûre sous-cutanée, ce
que n’
importe quel étudiant de 4e année de médecine sait faire. Ça demande... quinze
secondes en tout et pour tout. De plus, il existe des bras en plastique qui
permettent d’apprendre à le faire sans martyriser les patientes. C’est comme
ça que j’ai appris. J’ai personnellement posé près de 300 implants depuis
2001, et ça s’est toujours bien passé.

Il n’est également pas rare que les patientes qui m’apportent leur implant
me disent : « Mon/ma gynécologue ne veut pas le faire parce que ce n’est pas
« coté ». »
Autrement dit : « Ils ne le posent pas parce qu’il n’y a pas de tarif de référence pour se faire payer ce geste »...

Un gynécologue gentil, mais coûteux...

Voici, à ce propos, ce que m’écrit un des lecteurs/visiteurs du site :

Deux ans après vous avoir interrogé sur l’implant contraceptif par mon
intermédiaire (et elle y avait renoncé à l’époque parce que son médecin la
bombardait d’avertissements qui trahissaient d’abord son ignorance à lui et ses
réticences à lui, et dans ces conditions elle n’avait pas envie d’insister), [une de mes amies] s’en est fait poser un par un gynécologue-obstétricien
hospitalier, et nous a raconté tout ça.

Médecin charmant, pose rapide et facile, tout est parfait, sauf... LE PRIX !
Le cher gynécologue-obstétricien lui a expliqué qu’il s’est renseigné auprès
de la sécu, que la pose de l’implant n’est pas référencée, et qu’en
conséquence il la facturait 60 euros code H.N. (ce qui signifie que ça n’est pas du
tout remboursé). [1]

Je précise que c’était pendant une consultation en secteur privé, car il a
un jour de consultation privé et un jour hospitalier :
- dans le premier cas mon amie paye sa consultation 25 euros et
le médecin lui donne une feuille de remboursement de la sécu,
- dans le second cas elle donnait sa carte vitale à l’accueil
et ne payait pas (elle était enceinte donc couverte à 100% quand ce cas
s’est présenté).

Je remarque donc que le jour de la pose de l’implant, il lui a fait payé 60
euros, sans compter, sur ces 60 euros, les25 euros de consultation qui
auraient pu faire l’objet d’un remboursement.

Il lui a donné une feuille de sécu sur laquelle il avait inscrit "60 euros
H.N." et lui a dit de l’envoyer directement à sa mutuelle, qui peut-être la
remboursera...

Comme il me semble que vos renseignements d’il y a 2 ans ne ressemblaient
pas du tout à ce genre de facturation (euphémisme), je me permets de vous
demander votre avis.

Autrement dit : un menteur et un escroc

Mon avis est simple : ce type est un menteur et un escroc.

Oui, vous avez bien lu :
escroc : n.m. « Qui pratique l’escroquerie = vol à l’aide d’artifices, de
méthodes frauduleuses » (Littré)

En effet :

 la pose d’un implant est parfaitement référencée dans la nomenclature des
actes médicaux sous l’intitulé QZLA004 (Pose d’implant pharmacologique
sous-cutané) Tarif : 12,37 Euros
 le retrait d’un implant est lui aussi référencé dans la nomenclature :
QZGA002 (Ablation ou changement d’implant pharmacologique sous-cutané) :
Tarif : 41,80 Euros

(Ces tarifs sont ceux applicables depuis le 1er septembre 2005. Vous pouvez les télécharger en cliquant sur l’icône "PDF" en bas de page).

Alors, bien sûr, en toute bonne logique, ce praticien aurait dû :
- soit faire payer à la patiente le prise d’une consultation (25
Euros), englobant la pose (C’est ce que je fais si j’ai passé du temps à
expliquer
la démarche. Sinon, je cote pose simple.)
- soit, s’il l’avait déjà vue au cours d’une consultation antérieure
pour lui décrire l’implant et son utilisation, et si cette seconde consultation
ne comprenait QUE l’insertion de l’implant, lui faire payer 12,37.

Or, en l’occurrence il lui a pris un tarif exorbitant en le « justifiant »
par un mensonge. C’est bien une escroquerie. De plus, il a commis un faux : une
feuille de maladie portant la mention « HN » (hors nomenclature) alors que
les actes qu’il a effectués (consultation, pose d’implant) sont tous les deux
parfaitement référencés.

En admettant qu’il ne sache pas que la pose est référencée, les 60 euros qu’il prend pour insérer un implant sont absolument abusifs, en comparaison avec le tarif habituel de pose d’un DIU (voir en fin d’article), geste qui est tout de même beaucoup plus délicat !!! Et il n’est pas interdit de penser qu’il profite de ses consultations en "secteur privé" pour sur-facturer un geste qu’il ne pourrait pas faire payer autant en consultation "publique" (donc, à tarifs fixés par la sécurité sociale). L’escroquerie se situe donc là, également.

Ce type de comportement n’est malheureusement pas limité aux implants. Il y
a une quinzaine d’années, quand j’étais généraliste à la campagne, les femmes
à qui je posais un DIU à mon cabinet s’étonnaient : certains gynécologues de
ville faisaient couramment entrer les patientes en clinique et inséraient
des DIU sous anesthésie générale. Une juteuse escroquerie à la sécu...

Faut-il laisser faire ?

En l’occurrence, même si la sécu en sort indemne, l’escroquerie est tout de
même évidente (et l’irrégularité manifeste). À mon avis, la patiente
devrait écrire au gynécologue pour lui réclamer le trop-perçu (ainsi qu’une
nouvelle feuille de maladie) et, s’il n’obtempère pas, renvoyer écrire à la
sécu
pour signaler cette anomalie (il n’a pas le droit de « coter » faussement) ainsi
qu’au Conseil de l’Ordre pour signaler que ce praticien ne prend pas du
tout des honoraires fixés « avec tact et mesure » (comme le stipule le code de
déontologie pour les honoraires « libres » d’un praticien en secteur privé).

Qu’un médecin refuse de poser ou d’enlever un implant, c’est dommage (et
assez peu compréhensible) mais après tout, ça ne coûte rien. Qu’un praticien
fasse payer la pose ou le retrait d’un implant hors des tarifs fixés par la
sécurité sociale, c’est non seulement inadmissible sur le plan moral, mais c’est illégal. Et ne rien
dire, c’est permettre que ça continue...

Question : quand un médecin ment sur les tarifs qu’il vous fait payer, qui peut vous assurer qu’il ne ment pas aussi sur tout le reste ?

Martin Winckler


Suite de l’histoire.

A la suite de notre échange de courrier, mon amie est allée gentiment dire à son gynéco-obstétricien (qui lui avait fait payer 60 euros la pose de son implant contraceptif et lui avait dit que ça n’était ni coté ni remboursé par la sécu) qu’elle s’était renseignée et que c’était coté QZLA004 (Pose d’implant pharmacologique sous-cutané) Tarif : 12,37 Euros .

Il était très pressé, a fait l’étonné, et l’a renvoyée à sa secrétaire. Sa secrétaire fut un instant très embêtée, et puis elle lui a répondu d’un ton cassant que de toute façon ça n’était pas remboursé, plus quelques phrases sur l’inexactitude de ses renseignements et l’inutilité de cette démarche puisque ça n’est pas remboursé, la voix suffisamment forte pour l’intimider et la faire passer pour une idiote devant d’autres patientes qui attendaient.

Mon amie est de plus en plus abasourdie , et assez remontée ! Elle a téléphoné à la sécurité sociale et la personne qu’elle a eu au téléphone était bien évidemment scandalisée par ce comportement, surtout de la part d’un chef de service d’un hôpital public !

Bon, maintenant, si elle veut être remboursé, c’est à l’ordre des médecns qu’elle doit écrire, ou à la sécurité sociale ? Et peut-être à un service particulier ? (Repression des fraudes ? Ca existe ?)

Réponse de Martin Winckler :

A mon avis, le plus simple est qu’elle demande le remboursement au gynéco par lettre recommandée + AR en précisant que faute de réponse de sa part sous 7 jours, elle envoie une réclamation à la sécu, au Conseil de l’Ordre et au FISC !!!

Je suis prêt à parier qu’il la remboursera, car les contrôles fiscaux, c’est le cauchemar des médecins « libéraux ». Sachez par ailleurs que les honoraires d’un médecin en secteur privé doivent être versés à l’hôpital, non au médecin, car celui-ci doit une redevance à l’hôpital. Si le gynéco a touché les 60 Euros directement, il est dans l’illégalité... car c’est considéré comme une escroquerie à l’égard de l’hôpital et du fisc (c’est l’hôpital qui doit déclarer les sommes perçues...)

MW

Que coûtent la pose et le retrait d’un DIU ?

Lire ICI


[1HN signifie « hors nomenclature »




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